de ark le 17 Fév 2007 01:32
Pesmerga marchait sans but dans la douceur matinale. La ville lui semblait grise et terne, presque sans vie. Il était encerclé de solides habitations aux volets et aux portes imposantes et toute hermétiquement closes. C’est alors qu’il vit une première fenêtre s’ouvrir timidement. L’homme jeta un coup d’oeil tout autour et observa longuement le soleil levant avec une satisfaction non dissimulée. Bientôt, d’autres fenêtres s’ouvrirent.
Pesmerga observait avec curiosité les villageois pointer doucement leur museau hors de leur habitations. Tous semblaient accueillir le soleil comme s’il avait eu peur de ne plus jamais le revoir. Rien de bien extraordinaire se dit Pesmerga, chaque ville a ses petites habitudes. Il lui semblait qu’il avait beaucoup voyagé et que le spectacle d’une routine inconnue ne le dérangeait pas outre mesure. De toute façon, il aurait été stupide de se sentir dépaysé compte tenu du fait qu’il n’avait aucun souvenir de ses terres natales. Cette ville en valait bien une autre et elle serait sûrement en mesure de lui offrir l’hospitalité et le réconfort dont il avait besoin car il était fatigué comme s’il avait due parcourir des miles et des miles dans la plus parfaite solitude au milieu de l’obscurité. Il lui semblait qu’il aurait du chercher un lieu pour se reposer mais ce n’était pas une fatigue physique. Il avait beau se concentrer, il était incapable de ressentir la moindre lassitude dans ses membres et cela lui fit un peu peur. Etait se bien des muscles qui faisaient se mouvoir cette carcasse d’acier dont il était prisonnier ? Y’avaient ils des os, de la chair et des nerfs pour ressentir la fatigue et la douleur?
Le soleil lui faisait cependant du bien de la même façon qu’il semblait ramener la vie dans le village. La lumière redonnait des couleurs à la ville tandis que les bâtiments s’ouvraient vers l’extérieur. Pesmerga faillit d’ailleurs prendre un volet dans la figure tandis qu’il marchait prêt d’un mur. La jeune femme qui venait d’ouvrir précipitamment ne s’excusa pas le moins du monde. Au lieu de cela, elle dévisagea le chevalier noir pris d’un malaise et referma aussitôt. Il n’était soudain plus sure qu’il s’agissait simplement de coutumes étranges, il y avait quelque chose de dérangeant ici. A bien y regarder, beaucoup de villageois lui jetaient des regards en coin, lui renvoyant en pleine figure ses doutes sur sa nature. Qu’importe, ça allait sûrement passer, certaines personnes ne sont pas habituées à voir des étrangers. Le temps lui donna raison, une heure après l’aube, plus personne ne fit outre mesure attention à lui. Il devait maintenant faire face à l’indifférence qui caractérise les villes d’une certaine importance. Les êtres humains avaient ils toujours été ainsi ? Si peu soucieux les uns des autres, chacun occupé à sa propre besogne? Voilà qu’il se mettait à parler d’eux à la 3eme personne. Inutile de se sentir marginalisé, il n’avait quand même pas été assez bête pour espérer trouver un foyer ici. Pourtant il ne pouvait s’empêcher d’être déçu. Il avait de toute évidence placé trop d’espoir dans cette ville. Je ne suis jamais content pensa il de lui-même et cela est bien humain il me semble.
Au diable toutes ces considérations, il devait maintenant se concentrer sur ses objectifs. Il lui fallait retrouver l’autre chevalier noir et reprendre pied. Peut être commencer par apprendre où il se trouvait lui même ?
Il lui faudrait le demander aux villageois quitte à attirer de nouveau la suspicion sur lui. Il n’avait que l’embarras du choix, il était arrivé à ce qui aurait pu ressembler à un marché. Tout autour de lui, il y avait des étalages colorés et des commerçants tentant d’attirer le client. Pesmerga remarqua qu’une grande partie des magasins proposait des objets aux formes hétéroclites. La plupart étaient gravés de symboles étranges mais qui lui étaient attirants pour une raison inconnue. Pesmerga fit plusieurs tentatives auprès des commerçants pour obtenir des informations mais la plupart affectaient de ne pas avoir le temps ou de ne rien savoir. Tous le regardaient avec une méfiance flagrante des qu’il tentait de savoir où il se trouvait. La seule chose que Pesmerga parvint à apprendre était que le prix du poisson était plutôt élevé par rapport aux autres denrées.
Il s’approcha d’un autre magasin pour faire une nouvelle tentative quand un jeune garçon lui rentra brutalement dedans. Le jeune pressé qui ne devait pas avoir plus de 12 ans se retrouva alors les fesses par terre, se frottant douloureusement la tête.
-Aie, aie, aie. Maman me disait toujours de regarder devant moi. Scusez moi m’sieur.
Le garçon releva la tête et ouvrit des yeux ronds derrière de longs cheveux blonds.
-whaaaa, vous êtes un chevalier? Je n’en ai jamais vu par ici. Qu’est ce qu’elle est chouette votre armure ! Elle doit valoir très très cher. Quels beaux ornements et tout dorés en plus ! Vous n’êtes pas n’importe qui vous. Comment vous vous appelez ?
Pesmerga resta sans dire un mot à fixer l’étrange garçon qui fit alors la grimace.
-Vous êtes fâché ? dit il timidement.
-Laisse moi en paix.
Le gamin afficha alors une énorme déception puis son visage s’illumina de nouveau prenant pesmerga totalement de court.
-Soyez pas méchant avec moi. Je suis sure que je peux vous être utile ! Vous avez l’air totalement perdu et moi je connais le coin comme ma poche ! Faites moi confiance, je vais m’occuper de vous. Au fait, je m’appelle Erim, enchanté dit il en effectuant une révérence maladroite qui aurait presque arraché un sourire à Pesmerga. Quelle fraîcheur et quelle naïveté chez cette enfant. Il n’aurait pas voulu l’admettre mais cela lui faisait le plus grand bien.
-Que proposes tu ?
L’enfant eu un large sourire de victoire puis pris l’air de réfléchir.
-Je pourrais vous emmener dans l’auberge de mon père pour me faire pardonner.
-Je ne resterais pas ici longtemps, je partirais sûrement avant la fin de la journée.
Cette fois, le visage du garçon exprima une vive incompréhension et il pris quelques secondes avant de répondre.
-Mais personne ne peut quitter le village la nuit, c’est trop dangereux ! et puis pour aller où ? la guerre fait rage à l’est, on ne sait même pas combien de temps le pays tiendra contre Ravencroft. Sieg Hart a fait fermer le col de Bifrost, il n’y a nulle part ou aller de toute façon... à part vers l’ouest…
-Tu sembles en savoir bien plus long que je ne le pensais (et les autres villageois m’ont l’air plutôt hostiles ajouta-t-il pour lui-même). Serait il possible que tu m’apprennes tout ce que tu sais ?
-Bien sur fit il ravis. Il prit un sourire espiègle. Si vous venez avec moi à l’auberge !
-D’accord finit par lâcher Pesmerga résigné, j’imagine que je n’ai pas le choix.
-Super ! Venez, c’est par la.
Un peu brusqué, le chevalier se dit qu’après tout plus vite il irait, plus vite ce serait terminé mais il réalisa rapidement son erreur et regretta sa décision quand le garçon pris l’initiative de le submerger de questions diverses. D’où il venait ? Combien pesait l’épée ? En quoi était faite l’armure ? Que de questions qui l’embarrassaient et qu’il fit mine d’ignorer ce qui ne découragea pas Erim le moins du monde. De toute façon, Pesmerga aurait été incapable de répondre à la moitié d’entre elles même s’il l’avait voulu et cela ne fit qu’augmenter son exaspération. Pourtant il ne se fâcha pas, quelque chose chez cet enfant le touchait et plus encore, quelque chose lui était familier. Ce garçon lui rappelait quelqu’un assurément mais qui ?
Les commerces cédèrent rapidement la place à des ruelles vides. Pas âmes qui vivent, les murs étaient lézardés et les toits tombaient en ruine. Certaines affichaient même de larges trous comme autant de profondes gueules noires dans leurs murs. Les maisons étaient si hautes que le soleil pénétrait qu’à grande peine jusqu'à la rue.
Ils étaient maintenant perdus au milieu d’un véritable dédale de petites ruelles, rien de bien rassurant.
Le bon coté chez Erim, c’est qu’il n’y avait pas besoin de lui demander des explications, il n’était pas avare de paroles. Il expliqua de lui-même que tout le centre ville avait été abandonné. Les maisons étaient bien trop grandes et vétustes, le tout aurait pu s’effondrer comme un rien. Il semblerait que cela avait été construit dans la précipitation en vue d’accueillir un grand nombre de personnes avant que l’on ne reconstruise des habitations plus agréables autour. Les explications du jeune garçon était plutôt vagues mais il ne semblait pas en savoir d’avantage. On lui avait formellement interdit de venir ici bien sur mais Erim semblait peu enclin à suivre les ordres.
-C’est juste au tournant dit Erim après plusieurs minutes de zigzag entre les constructions chaotiques.
Ils arrivèrent devant une grande battisse dont l’état était à peine meilleur que celui des constructions alentour cependant la porte était ouverte et une pancarte invitait à entrer. Les affaires ne devaient pas être au mieux, il était évident qu’aucun natif du village ne se serait risqué jusque là.
L’enfant se dirigea prudemment vers une fenêtre pour y jeter un coup d’oeil et en revint tout grimaçant sur la pointe des pieds.
-Aie, papa est la ! Je ne pourrais pas vous faire passer par l’entrée ou alors il vous fera payer une fortune. Ecoutez, je vais essayer de vous faire entrer par cette fenêtre dit il en montrant une ouverture à hauteur respectueuse. Ne bougez pas de là, je vais chercher l’échelle.
Et il s’engouffra immédiatement dans la porte.
Eh bien ça promet pensa le chevalier.
Pesmerga tacha alors de se soustraire aux regards d’éventuel curieux et quand il fut sur que personne ne regardait, il monta sur une caisse posée là, pris appui sur le toit d’une maison voisine et bondit jusqu’a la fenêtre ouverte.
La chambre était vide, personne pour le surprendre en train de se glisser à l’intérieur. C’était une petite chambre aménagée simplement. Une lit défait sur une petite paillasse, une table ou était posé un boite de bougies et une chaise en bois rudimentaire.
Erim finit par débouler dans la chambre visiblement fort surpris de trouver le chevalier planté au milieu.
-Incroyable fit il au comble de la fascination.
Il partit aussitôt se pencher à la fenêtre pour apprécier la hauteur sous l’œil circonspect du chevalier.
-Génial insista le garçon en revenant sur ses pas.
-Dis moi, qu’est ce que c’est que ça coupa Pesmerga en désignant, perché sur la tête de Erim, le petit écureuil qui regardait avec curiosité le doigt tendu vers lui.
-Ca ? fit il en prenant l’animal qui avait immédiatement sauté dans sa main. C’est Mojo. Il l’approcha de son visage et la petite boule de fourrure vint se blottir contre sa joue avant de venir se percher de nouveau sur sa tête. Je l’ai trouvé aux abords de la forêt il y a quelques mois et il ne m’a jamais quitté.
-La foret ? C’est de la que je viens. Il y a un grand château là bas non ?
Erim le fixait éberlué.
-vous êtes allez la bas ? Vous devez être très très fort. La forêt est très dangereuse et remplie de monstres inconnus, personne ne s’y aventure et ne sait ce qu’il y a derrière. Elle encercle le village par l’ouest. Le château est le bâtiment le plus avancé que nous connaissions. Il devait servir d’avant poste pour des futurs explorations mais le projet a été abandonné, on dit que la gardes ont été décimés… C’était bien avant ma naissance m’a dit papa.
C’est vrai que le château avait l’air abandonné pensa Pesmerga mais il y avait cette femme là bas… Est-ce qu’il y a un rapport ? Je devrais peut être y retourner mais cette maudite grille m’en interdit l’accès, on m’a enfermé dehors comme un chien.
-Où sommes nous Erim ? La ville je veux dire, quel est son nom ?
-vous êtes vraiment très étrange monsieur le chevalier noir. Nous sommes dans la ville de Torqwin à l’ouest du vieux continent, derrière les montagnes du Jormagund. Comment pouvez vous l’ignorer, c’est le seul chemin pour venir ici à moins que vous ne soyez pas un fugitif tentant d’échapper à la guerre… vous ne venez tout de même pas de l’ouest hurla presque Erim au comble de l’excitation. Vous êtes avec les gens de la nuit ?
-J’ai perdu la mémoire dit il simplement pour couper court à toute question.
La conversation tourna court quand une voie rude de paysan se fit entendre de l’extérieure de la pièce
-Erim, qu’est ce que tu fais ? Viens ici, tu n’as pas fini ton travail.
-J’arrive papa.
Puis il dit plus bas
-Je viendrais vous voir plus tard pour vous apporter à manger. On ne devrait pas venir vous déranger, la fenêtre est cassée et personne ne serait assez fou pour dormir dans ces conditions.
Et il partit comme il était venu non sans refermer la porte derrière lui mais en laissant Pesmerga en proie à de vives interrogations. Il avait malgré tout avancé dans ses recherches. Si la contrée ne lui rappelait absolument rien, il avait en revanche une idée plus précise de la géographie locale et cela pouvait toujours servir s’il ne voulait pas moisir ici.
Il n’avait aucune intention de rester dans la chambre à ne rien faire mais l'idée de sortir de nouveau le répugnait. Le souvenir de tous ces regards sur lui puis de leur indifférence le rendait mal à l’aise. Et puis il y avait quelque chose d'autre, quelque chose de lourd dans l'air qui semblait remonter du sol, une impression sourde qui venait l'agresser jusqu'ici. Cela ne venait pas simplement de l'extérieur comprit il. Une forte odeur de mort se dégageait de la chambre et il porta un regard soupçonneux sur les charnières défoncées des volets.
Cela le décida à sortir. Il se rapprocha de la fenêtre et sauta sur le toit le plus proche après s’être assuré que personne n’aurait pu l’observer. Un foret de toitures s’étalait devant lui. C’était parfait, il n’aurait pas à regagner les rues qui lui faisaient l’effet de caniveaux aux ramifications complexes d'ou s'écoulaient les gens au milieu des déchets. Et puis il n’aurait à subir le regarde et la méfiance de personne. Il se sentait bien plus en paix dans les hauteurs. Il commença donc sa progression de toit en toit tout en évitant les zones qui risquaient de s’écrouler sous son poids. Il se déplaçait rapidement et sans un bruit, portant sa lourde armure comme si elle avait été de papier. Il commençait à se familiariser avec ses capacités et son « corps ».
Il finit par arriver à un bâtiment entièrement en pierre, garni de statues représentant des créatures ailées à l’air menaçant. Il ne pu s’empêcher d’admirer l’architecture complexe et les murs sculptés. Sûrement un vieux bâtiment qui avait visiblement perdus ses fonctions pour loger des sans abris à en juger par les aménagements qu’il pouvait apercevoir par une ouverture.
Il trouva une statue qui attira son attention. Elle était à l’effigie d’une créature étrange aux ailes d’anges. Elle avait un corps harmonieux et un visage saisissant de beauté jusqu'à ce qu’on aperçoive les vilaines canines qui pointaient hors de sa bouche et les 2 cornes qui dépassaient de ses cheveux bouclés. Elle portait dans une main un globe terrestre et avait gravé sur tout le corps des symboles indéchiffrables.
Pesmerga se calfeutra instinctivement sous les ailes accueillantes de la créature et tendis l’oreille aux discussions des passants.
En bas, un commerçant qui tentait de vendre sa viande faisait un boucan de tous les diables. Heureusement, l’odeur écoeurante du sang ne dérangea pas le moins du monde le chevalier. Quand il pu faire abstraction des cries du vendeurs, il réussit à saisir des bribes de conversation. Il entendit vaguement parler de tensions entre plusieurs royaumes, de la dernière escarmouche qui avait tourné en bain de sang, d'un roi cruel, de seigneurs à bout de force. Rien de bien original, il avait déjà appris de la bouche d’Erim que le pays était en guerre et les paysans en parlaient comme il était de leur habitude de le faire, vaguement inquiet qu’elle n’arrive jusqu’à eux. Cette éventualité semblait peu envisageable compte tenu de leur isolement pourtant il était intéressant de constater que tous semblaient persuadés que cela arriverait. Il y aurait donc quelque chose ici de suffisamment convoitable pour que cela motive une grande armée à franchir un col de montagne difficile. Il était dur d’imaginer qu’il s’agissait de ressources ayant une forte valeur commerçante à en juger par la pauvreté du village. Pourtant quelque chose avait également attiré les colons en hâte ici, provoquant certainement cette construction anarchique et précipitée. Mais qu’avait il bien pu se passer pour que tous le centre ville soit abandonné ? Les villageois semblaient maintenant plus piégés ici qu’autre chose. La promesse d’un nouveau monde à l’ouest motiverait il le fameux royaume de Ravencroft à prendre la mourante Torqwin ?
Parmi toutes les discussions, il en entendit soudain une qui attira son attention.
Deux jeunes femmes avaient évoqué le mot disparition. Pesmerga se surprit à espérer que l'on parle de lui. Il observa avidement la femme qui avait pris la parole, cherchant à stimuler sa mémoire. Mais à son grand désespoir, cette femme d'une navrante banalité lui rappelait toutes les autres: un visage sombre entouré de longs cheveux tressés et habillée d'un tablier sur laquelle elle tentait encore et encore d'essuyer ses mains rendues calleuses par le travail. Il prêta oreille néanmoins à ses paroles. Il y faisait mention d'une certaine Talia qui avait été "emportée" (elle avait utilisé une expression qu'il ne saisissait pas bien) une nuit alors qu'elle séjournait à l'auberge du père Kaor.
La jeune femme qui lui faisait face l'encouragea alors à se taire pour "ne pas attirer le mauvais oeil". Les 2 villageoises continuèrent leur chemin sur des sujets de conversations plus légers et Pesmerga n'en su pas d’avantage.
Il n'avait pas été question de lui. Apres tout il avait été stupide d'espérer. Toutes ses illusions auraient du s'envoler quand il avait vu la façon dont les villageois le dévisageaient. Il était clair que personne ne l'avait reconnu et qu'il n'était pas ici chez lui.
Il n'apprit rien d'autre d'intéressant et peu à peu, son esprit s'éleva et il quitta l'agitation des rues pour contempler le ciel qui s’ouvrait à l’infini au dessus de sa tête. Il ressentit alors une profonde sérénité et se trouva incapable de détourner le regard de ce spectacle. Tout en observant la lumière jouer sur les nuages, il se laissa aller à la rêverie pendant des heures. Il lui semblait avoir trouvé sa place à l’abri de cette statue au dessus de l’agitation, de la méfiance et de la peur.
Peu à peu, la nuit tomba sur lui, le soleil tira sa révérence après un dernier flamboiement qui avait ensanglanté toutes les façades.
Il ne sentit pas le vent se lever ni même la fraîcheur naissante.
Il ne vit pas non plus la vie quitter progressivement les rues, les villageois se barricader comme s'ils voyaient la douce et reposante obscurité comme une redoutable ennemie.
Le nez levé, il vit tout à coup poindre la première étoile qui perçait timidement la nuit. Il en eu le souffle coupé comme si cela avait une révélation. Son éclat se fit de plus en plus ardant comme un feu que l’on aurait allumé. Puis il y eu d’autres. Une à une, il les contempla illuminer le ciel sans comprendre la sensation qu'il ressentait. D’abords solitaires, les étoiles s'organisèrent sous ses yeux selon une hiérarchie bien précise, formant des constellations. Sans savoir quoi, il y vit alors d'avantage et cela semblait avoir un sens profond. Il tenta d'en déchiffrer le code comme si le secret de son existence était perché là, parmi ces fantastiques et fragiles taches de lumière vacillantes au milieu des ténèbres.
Il y resta jusqu'à tard, forme sombre adossé à la pierre quand un bruissement vint interrompre sa rêverie. Alarmé par le mouvement proche, il tourna vivement la tête vers la source du bruit. Un corbeau était venu couronner la tête d'une statue une dizaine de mètres plus loin. Il émit un croassement sinistre en envoyant un regard courroucé au chevalier comme s'il avait surpris un intrus chez lui. Pesmerga se rasséréna mais a peine eu t il détourner le regard qu'il entendit un cri sinistre et un froissement de plumes. L'oiseau avait disparu.
Pesmerga se redressa vivement comme pris d'un pressentiment et s'en alla promptement vers l'auberge sans en oublier d'inspecter le moindre coin d'ombre sur le chemin avec une méfiance accrue. Il y avait quelque chose avec lui sur les toits, il en était certain.
Il ne tarda pas a être en vu de la fenêtre qu’il avait quitté dans la matinée et stoppa net en apercevant une forme grise s'en échapper. Bien qu’il aurait été impossible pour un humain de distinguer le chevalier, la forme tourna vivement la tête dans sa direction comme s'il avait été fluorescent et Pesmerga vit un bref instant 2 yeux étincelants suspendus dans la nuit braqués droit sur lui.
Le chevalier resta quelques secondes figé d'effroi et c'est à ce moment qu'il aperçu à ses pieds un oiseau mort pratiquement coupé en deux. Il ne pu s'empêcher de remarquer qu'il n'y avait pratiquement pas de sang qui s'écoulait de la carcasse du corbeau gisant brisé. Quelque chose avait massacré l'animal et ce quelque chose l'avait fait à quelques mètres de Pesmerga. Maintenant elle rodait dehors en toute liberté.
C'est alors qu'un éclat orangé inhabituel vint se refléter sur son armure. En bas, l'agitation semblait avoir gagnée la rue et il vit de sa cachette plusieurs villageois équipés de torches sortir de l'auberge.
Il entra par la fenêtre de l’auberge jusqu'à sa chambre et tomba sur un Erim paniqué et un Mojo qui tentait à grande peine de rester sur la tête de ce dernier.
-Mon père est sorti, j’ai tellement peur. Les villageois disent qu’ils vont en finir avec ceux de la nuit, qu’ils refusent de vivre dans la terreur, qu’ils sont prêts à se battre maintenant.
Il sembla prêt à pleurer quand son regard se braqua sur le gant maculé de sang de Pesmerga. Pesmerga avait fait l'erreur de porter l'oiseau mort dans sa main un court instant et bien qu’exsangue, le corbeau avait du laisser de brillantes taches rouges.
-Qu’est ce que vous avez fait dit Erim tremblant ?
Il ignorait pourquoi, mais le bien être de ce garçon avait de l’importance à ses yeux. Oui, il fallait protéger l’enfant coûte que coûte parce qu’il n’avait pas pu le faire avec un autre qui lui ressemblait tant dans le passé. Il tenta de le rassurer.
-Ecoute, ne t’en fais pas, je vais aller m’assurer que tout se passera bien. Fais moi confiance.
Erim paru légèrement rassuré et observa Pesmerga bondir hors de la chambre.
Il atteignit rapidement un petit clocher non loin de là et après quelques sauts, il pu observer de sa position stratégique les mouvements des torches. Il les vit gagner en vitesse, se déplaçant toujours plus rapidement en serpentant entre les maisons puis elles finirent par s’arrêter et Pesmerga intrigué se rendit sur les lieux.
Merci.